Secteur des fonds luxembourgeois : des conditions propices à la croissance
La finance durable, l’innovation et le Brexit présentent un certain nombre d’opportunités pour le secteur des fonds luxembourgeois. Selon Mathieu Maurier, Responsable Pays de Société Générale Securities Services au Luxembourg, nous pouvons saisir ces opportunités en adoptant une approche collaborative et en étant ouverts au changement.
La place financière luxembourgeoise a acquis la réputation d’être agile lorsque de nouvelles opportunités se présentent. En 1988, le Luxembourg est devenu le premier pays à mettre en œuvre la première directive européenne pour les fonds, ce qui lui a permis d’attirer les OPCVM. Le pays est aujourd’hui le plus grand domicile de fonds en Europe et un leader mondial de la distribution croisée de fonds. Mais cela ne s’est pas fait du jour au lendemain. Il a fallu obtenir la coopération des acteurs publics et privés, créer un environnement réglementaire adéquat et développer l’expertise nécessaire.
Plus de trente ans plus tard, le Luxembourg a l’occasion de démontrer une nouvelle fois sa capacité d’adaptation en devenant une plateforme mondiale de la finance durable. Le marché des fonds durables connaît une croissance rapide et le Luxembourg est bien positionné pour en bénéficier. Selon Morningstar, 1 650 milliards de dollars étaient investis dans des fonds durables à fin 2020, 77 % de ces flux provenant d’Europe1.
Il ne fait aucun doute que le Luxembourg adhère aux principes de l’investissement durable. Nous sommes désormais convaincus de la nécessité de prendre la finance durable au sérieux. La plupart des gens reconnaissent que la finance durable est l’avenir, mais il reste encore beaucoup à faire.
Le Règlement sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers (SFDR), entré en vigueur le 10 mars 2021, impose d’améliorer la transparence sur la durabilité au niveau des entités et des produits financiers. En ce qui concerne ces informations, la définition d’une politique de risque ou de rémunération durable afin de mettre en œuvre correctement le SFDR n’est toujours pas claire.
Toutefois, ce règlement donne aux entreprises l’occasion de mesurer leur durabilité et leur impact éthique par rapport à leurs concurrents. Le SFDR ne marque que le début du parcours de la finance durable. Les entreprises doivent s’assurer que les processus et les données appropriés sont en place avant le début des rapports périodiques en 2022.
Tout comme en 1988, la collaboration entre les entités publiques et privées sera essentielle pour atteindre les nouveaux objectifs. La Luxembourg Sustainable Finance Initiative (LSFI) et sa nouvelle stratégie, qu’elle a dévoilée début mars, renforceront la sensibilisation et aideront le Luxembourg à devenir une plateforme de finance durable.
Des investissements qui ont du sens
La communauté financière luxembourgeoise adhère également à l’innovation technologique. Investir dans les nouvelles technologies permettra non seulement aux entreprises de gagner en efficacité, mais aussi de rester compétitives.
Par le passé, la plupart des investisseurs ne s’intéressaient qu’au retour sur investissement attendu. Cette situation est en train de changer à mesure que les entreprises cherchent à attirer un groupe d’investisseurs plus jeunes, à l’aise avec le numérique et ayant une plus forte conscience sociale. La nouvelle génération qui émerge valorise aussi la transparence et veut que ses investissements aient du sens. Bien sûr, ces investisseurs souhaitent réaliser des bénéfices, mais ils veulent également savoir où va leur argent et comment leurs données sont utilisées. Cela exige de repenser fondamentalement la manière dont les prestataires de services financiers prennent des décisions d’investissement. Les entreprises devront en outre réajuster leur offre pour attirer un segment diversifié d’investisseurs.
Le Luxembourg a un rôle important à jouer, car il dispose de l’expertise nécessaire pour trouver les bonnes solutions. Mais ce ne sera pas simple pour autant. Un nombre croissant d’entreprises le reconnaissent et ont commencé à mettre en place la technologie des registres distribués et le cloud computing afin d’améliorer leurs services. Les services d’agent de transfert, de comptabilité de fonds et de conservation devront tous optimiser leurs modèles opérationnels pour rester à la pointe du secteur.
Le Brexit ne se résume pas à des affrontements
On entend parler du Brexit depuis un certain temps déjà et le scénario le plus probable aujourd’hui table sur des changements minimes, voire aucun changement, par rapport à l’accord de décembre 2020. Dans les médias, le débat sur le Brexit s’est parfois résumé à un affrontement stérile entre des intervenants des camps opposés se disputant au sujet des futurs gagnants et perdants.
Cette vision simpliste du Brexit ne tient pas compte de l’expertise nécessaire pour développer un écosystème de services financiers. C’est pourquoi je ne pense pas que le Royaume-Uni concurrencera le secteur des fonds luxembourgeois. Je m’attends plutôt à ce que les entreprises britanniques tissent des liens plus étroits avec notre pays afin de pouvoir tirer parti des services que nous offrons ici.
Toutefois, du côté des actifs privés, les centres offshore au Royaume-Uni auront la possibilité de mettre à profit les régimes locaux. Cela reste à voir, mais il se pourrait que la concurrence s’intensifie entre les deux pays dans le domaine des actifs privés.
Tournage vidéo - Messages clés
Quelles sont les opportunités à venir pour la place financière luxembourgeoise ?
La finance durable est une formidable opportunité pour le Luxembourg. Il ne fait aucun doute que le secteur adhère aux principes de l’investissement durable. Mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir en ce qui concerne le respect des nouvelles réglementations en matière de publication d’informations, la mise en place de certains processus et la production des données adéquates. Nous devons traduire nos ambitions en actes.
Quel sera le rôle de l’innovation dans le secteur financier luxembourgeois ?
Investir dans les nouvelles technologies permettra non seulement aux entreprises de gagner en efficacité, mais aussi de rester compétitives. De plus en plus d’entreprises mettent en place la technologie des registres distribués et le cloud computing pour optimiser leurs modèles opérationnels. Le Luxembourg restera ainsi à la pointe du secteur financier.
Quels sont les opportunités et les risques associés au Brexit ?
Les entreprises se préparent depuis longtemps au Brexit et beaucoup sont déjà présentes au Luxembourg. Je ne pense pas que le Royaume-Uni essaiera de concurrencer le Luxembourg. Je m’attends plutôt à ce que les entreprises britanniques nouent des liens plus étroits avec le Luxembourg afin de pouvoir tirer parti de l’expertise que nous avons développée ici depuis de nombreuses années.
Article publié sur PaperJam.