À la rescousse… Comment le marché italien des NPE se transforme en un marché UTP et pourquoi seuls les plus forts survivront
Le marché italien des expositions non performantes (NPE) reste le plus important et le plus actif en Europe*, ce qui génère des opportunités d’investissement intéressantes pour les investisseurs institutionnels actifs sur les marchés privés et alternatifs.
Nous sommes aujourd’hui témoins d’un passage significatif des prêts non performants (NPL) aux prêts bancaires au remboursement peu probable (« Unlikely-to-Pay », ou UTP). Les UTP sont complètement différents des NPL et seuls les opérateurs disposant d’une expertise adéquate et d’un savoir-faire technologique avancé sont à même de tirer parti de la transformation en cours de la scène italienne des NPE. Voici pourquoi.
En 2015, les banques italiennes ont mis en œuvre un plan de désendettement considérable lorsque le montant brut des NPE a atteint plus de 340 milliards d’euros1. Fin 2021, Celui-ci ne s’élevait plus qu’à 78 milliards d’euros, dont 45 milliards d’euros d’UTP et 33 milliards d’euros de NPL2. Entre 2015 et 2021, le désendettement s’est concentré sur les NPL, et le GACS3 a joué un rôle clé. En résumé, le GACS est la garantie publique italienne émise en faveur de tranches senior Investment Grade de titrisations publiques de créances douteuses. C’est sans doute le GACS qui a relancé un marché de la titrisation publique plutôt éteint. Jusqu’à présent, le GACS a permis d’assainir le bilan des banques de près de 100 milliards d’euros de valeur comptable brute (GBV)4.
La transformation industrielle des gestionnaires de NPE en une approche intégrée et évolutive de la plateforme
Le stock total de NPE vendues aux investisseurs et toujours inscrites au bilan des banques italiennes représente plus de 400 milliards d’euros, l’exposition à l’immobilier représentant plus de 50 % du stock et les sociétés emprunteuses représentant plus de 80 % du total, principalement les petites et moyennes entreprises5 (PME). Des cessions de NPE pour environ 47 milliards d’euros de GBV sont attendues pour 20226. La conséquence a été une profonde transformation du secteur de la gestion des NPE, y compris l’immobilier comme garantie des prêts douteux.
Le rôle des UTP mérite aujourd’hui une attention particulière. Plus de 130 000 entreprises sont actuellement classées en UTP et, selon PwC7, les nouveaux flux de NPE seront principalement des petites et moyennes entreprises appartenant aux secteurs les plus touchés par la crise. Ces NPE nécessiteront une gestion ad hoc par les banques. L’évolution du contexte réglementaire (d’abord le provisionnement sur calendrier) et les caractéristiques des entrées de NPE attendues ne permettront pas aux banques de se comporter comme elles l’ont fait lors de la précédente crise, de cumuler des créances douteuses pendant des années et de s’en décharger à l’aide de solutions telles que le GACS.
Le rôle déterminant de la technologie, de la gestion des données et de l’intervention précoce dans les crises des entreprises dans la gestion de la prochaine vague de NPE
Le contexte macroéconomique existant crée un vaste marché pour les prêteurs spécialisés et les prêts directs, principalement pour soutenir les PME qui constituent le pilier de l’économie italienne. Le trading de factures, l’affacturage et les prêts alternatifs sont les domaines où nous pouvons déceler des opportunités de croissance intéressantes. Cependant, il faut garder à l’esprit que la plupart des nouveaux flux seront des UTP. À ce titre, il s’agira de prêts « actifs » qui nécessiteront une gestion ad hoc de la part des banques. Ces expositions devront être gérées et guidées non seulement par une institution financière, mais aussi et surtout par une logique sectorielle. Elles devront être gérées dans une perspective mixte de reprise, de redressement et de capital-investissement. Il est essentiel d’avoir une gestion proactive du crédit dès qu’une entreprise montre un premier signe de crise (de préférence à partir de l’étape 2, qui a atteint un pic à 220 milliards d’euros de GBV à la fin de 20218) et d’aider l’emprunteur à surmonter la phase négative à laquelle il est confronté. Très peu d’opérateurs possèdent cette combinaison aujourd’hui. Toutefois, il est important de noter que : les références de NPL ne sont pas une garantie de succès en matière d’UTP.
Enfin, le secteur de la gestion du crédit reste une entreprise à forte intensité humaine. Le secteur dans son ensemble doit fortement investir dans la numérisation et la gestion/valorisation des données. Seuls les opérateurs qui prennent cela au sérieux seront en mesure de prospérer et d’apporter une valeur substantielle.
Riccardo Serrini, PDG et directeur général de Prelios Group
* White & Case, COVID-19 and the state of the European NPL market, avril 2021
1 PwC, The Italian NPL Market, Transformation at Work…, décembre 2021
2 Banca Ifis, Italian NPL sales fall to €33bn last year, février 2022
3 Garanzia sulla Cartolarizzazione delle Sofferenze
4 PwC, The Italian NPL Market, Transformation at Work…, décembre 2021
5 Ibid.
6 Banca Ifis, Italian NPL sales fall to €33bn last year, février 2022
7PwC, The Italian NPL Market, Transformation at Work..., décembre 2021
8 Ibid.